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Le Naïf dans le Monde
26 octobre 2017

L’Avenir de l’automobile

Le 16 octobre dernier Nicolas Baverez publiait dans Le Figaro un article intitulé « L’avenir de l’automobile ».

Cet article est joint en annexe pour les lecteurs qui se demanderaient quelle est l’origine de mon mécontentement et qui chercheraient les raisons pour lesquelles j’épanche ma bile dans un texte, moitié article-moitié lettre, qui reprend le même titre.

Baverez a très souvent, presque toujours, un point de vue pertinent sur des tas de sujets : il a donc le droit de s’égarer parfois.

Un point de vue pertinent est évidemment un point de vue que je partage.

 

L’Avenir de l’automobile

 

Le succès du pétrole dans le développement de la consommation d’énergie qui a marqué le début du 19ème siècle tient à deux facteurs.

La densité énergétique du pétrole est supérieure à celle du charbon quoique du même ordre de grandeur ; mais surtout, le pétrole, par simple distillation, donne des carburants liquides offrant une large gamme d’emplois.

Liquide signifie facilité de transport, de stockage et surtout de distribution. Le charbon offre les mêmes avantages, et les gens d’un certain âge, se souviennent de l’époque où le bougnat livrait le coke et l’enfant descendait à la cave pour remonter le seau avec lequel on approvisionnait le Godin.

Mais le carburant liquide a ouvert le développement du moteur à explosion, qui au plan de l’utilisation individualisée se décline en toute taille du XXS à l’XXL. Le même moteur équipe le modèle réduit de l’avionneur du dimanche, la tondeuse du jardin ou les ailes de l’A380 qui développe au décollage la puissance d’une unité nucléaire.

Souplesse et densité sont les atouts du pétrole.

L’électricité qui est produite par la combustion des… combustibles ou par la fission d’autres minerais offre également une extraordinaire souplesse de distribution : elle est l’énergie qui peut aller partout et, elle aussi, en de tailles variées, du rasoir matinal jusqu’à… Jusqu’à quoi ?

Nous y voilà, jusqu’au moteur de la voiture.

Au-delà l’emploi devient très spécialisé et le seul exemple qui vienne à l’esprit est celui des pompes de relevage dans certains barrages ou les moteurs électriques couplés à des diesels qui équipent les grands paquebots et les sous-marins nucléaires. Il en existe sûrement bien d’autres, en particulier dans la traction ferroviaires…mais certainement pas en aéronautique.

Donc la voiture.

S’il est un domaine dans lequel le dialogue consommateur-producteur joue pleinement son rôle, c’est bien celui-là !

Daimler et Rockefeller sur les traces de Drake et de Beau de Rochas ont avec quelques copains, Ford, Renault ou Nobel et Rotschild , construit ce marché de l’automobile, automobile dont vous dites qu’elle « reste sans concurrent véritable…dernier kilomètre ». Ce qui est indéniable.

C’est peu dire que ce marché est structurant dans nos économies et le devient très rapidement dans les économies que l’on continue d’appeler par habitude en développement.

Donc toujours et encore la voiture.

Électrique, pourquoi pas. L’automobile électrique est encore onéreuse mais son prix baissera. Elle fonctionne très bien et de façon agréable.

Mais rien ne viendra altérer le fait qu’elle emmène ses batteries avec elle et que ce poids-batterie n’est en rien comparable au poids du carburant hydrocarbure équivalent. Ce rapport de densité énergétique est pour les batteries au plomb de l’ordre de 1 à 500 et il ne tombe que de 1 à 50 pour les batteries au Lithium dernier cri. Cela signifie qu’un kilo d’essence contient autant d’énergie disponible que 500 kilos de batterie du commerce ou 50 kilos de batterie nouvelle vague. Et cela impose et détermine la fréquence des recharges.

Grace aux efforts du regretté Rockefeller et de ses amis, je peux recharger ma petite Twingo en quelques minutes à peu près n’importe où dans l’environnement (comme on dit de nos jours) qui est le mien. Quand j’utilise ma petite Zoé, je la recharge en une nuit dans le calme de mon garage et à peu près nulle part ailleurs. Est-il besoin d’ajouter qu’ensuite je peux rouler avec ma petite Twingo jusqu’à Dijon alors que j’ose à peine aller à Aix (en Provence) avec ma petite Zoé. Vous aurez compris que j’habite Marseille.

Ces différences ne s’effaceront pas par un coup de baguette magique. Elles s’atténueront par des progrès réalisés sur performance et prix des batteries. Mais la problématique (encore la mode des mots à la mode) restera la même.

Je crains que M. Hulot et vous peut-être ne sous-estiment la puissance et le travail du Marché en ces domaines.

Les utilisateurs de voitures, vous, moi et les autres, achèteront les voitures du marché, comme elles leur seront offertes par les constructeurs, et les constructeurs fabriqueront les voitures que leurs clients, vous, moi et les autres, seront disposés à acheter.

La main invisible sera plus puissante que les confuses paroles de l’amuseur public.

 

Mais ma réaction à votre article récent ne se situe pas à ce niveau. Vous pensez que le marché de l’auto évoluera vers plus d’électrique. Soit. Je suis moins enclin que vous à y voir un basculement, même si dans l’espace urbain, l’électrique gagne du terrain, ce qui reste à vérifier. Soit.

Il est d’ailleurs naturel que les constructeurs se préparent à une évolution dans ce sens, et préparent des séries-pilotes pour explorer « en même temps » la technologie et le marché.

 

Le sujet sur lequel mon désaccord est absolu concerne le rôle de l’État dans ce dossier. Au nom de quelle déesse ou de quelle idéologie devrais-je attendre de l’État du cher et vieux pays, qu’il se mêle d’une affaire qui ne le regarde sinon en rien du moins en pas grand-chose.

 Dans le développement du siècle dernier de l’usage de l’automobile, l’État a bien sur largement contribué à la mise en place du réseau routier. Mais je ne sache pas que la nationalisation de Renault en janvier 1945 ou les aventures incertaines d’ERAP et d’Elf-Aquitaine ultérieurement, aient été des vecteurs de progrès décisifs dans ce qui est devenu le marché de l’auto comme nous le connaissons de nos jours.

 Il en sera de même pour le développement de l’électrique sur le marché de l’auto.

 Les contraintes techniques, liées aux lois fondamentales de la physique et de la thermodynamique, seraient-elles résolues par des avancées scientifiques ( ?), techniques ( ?) et technologiques que le marché évoluera dans ce sens par la baisse des prix : une meilleure offre.

 Ou bien la voiture électrique restera un marché de niche pour usage urbain.

 Les transports en commun présentent un cas particulier. L’électrique offre pour la ville beaucoup d’avantages. Mais il faudra toujours choisir entre un tramway vissé sur son rail ou suspendu sous sa caténaire, et un autobus qui démarre sa tournée avec en soute ses deux ou trois tonnes de batteries beaucoup plus lourdes que les usagers qu’il pourrait embarquer.  Sur l’eau, restons-en au Ferrybohate de l’ami Pagnol, qui vous le savez sans doute est « à la fois », « en même temps », électrique et en panne.

 Les distorsions introduites par l’État sur le marché de l’électricité pour les beaux yeux de Mesdames Joly et Duflot suffisent, sans que d’autres forces parasites soient suggérées sur le dossier bagnole qui évoluera en fonction des impératifs techniques et économiques. Et aussi des impératifs internationaux.

 Car enfin le marché de l’automobile est tout sauf national : les acteurs en sont les industries allemandes, américaines, coréennes, japonaises, françaises aussi, et leurs satellites. Ces systèmes industriels sont largement indépendants des nations dont ils sont issus : la mondialisation-globalisation a joué pour eux comme pour l’électronicien ou tout autre manufacturier. Et les souhaits directifs d’un présentateur de télévision mille fois Peterisé n’y changeront rien.

 De grâce, laissons l’État en dehors de tout ça et demandons-lui de s’occuper de ses affaires qui, incidemment sont les nôtres.

Qu’il réforme la fiscalité, qu’il s’occupe de l’immigration, qu’il gère enfin la sécurité sociale, qu’il définisse les rapports subtils qu’entretiennent une médecine gratuite et des professions de santé libérales, qu’il gère les entreprises dont il devrait, pour des raisons historiques, assurer la direction…voilà ce que nous attendons de lui et, je vous en prie, ne lui demandons pas d’installer les bornes de recharge des autos de demain.

 Au sujet de l’électricité, en particulier, puisque l’État se veut le promoteur du véhicule électrique, il serait de sa responsabilité de gérer sainement EDF et Areva.

Pour cela, il serait nécessaire qu’il cesse de considérer EDF comme un percepteur, un laboratoire du progrès social, une vache à dividendes ou comme le calice dans lequel fleuriront de douteuses énergies renouvelables. Et qu’il considère EDF pour ce qu’est cette entreprise : un producteur national et international d’électricité.

Et de combler chez Areva les ravages de l’onéreuse et très chère Sherpani qui aurait dû se préoccuper d’abord de la qualité de ses marmites à uranium avant que d’aller faire, en famille, ses courses au marché des mines sans minerais.

 Il faut sur ce sujet garder le sens des réalités.

L’écologiste de salon voudrait construire le mythe d’une énergie décarbonnée, dénucléarisée, surgissant, comme Vénus des flots, descendant comme Apollon du Soleil ou apportée dans les bras d’Éole.

De fait :

L’énergie primaire électrique n’est pas un mythe, mais son apport reste essentiellement celui de la houille blanche.

Les énergies renouvelables solaires et éoliennes sont toujours au niveau du % de l’énergie primaire produite dans le monde. Ces 1 ou 2 % sont d’ailleurs produits dans des pays dotés de réseaux électriques qui n’en ont donc nul besoin et pour lesquels absorber cette production marginale est une contrainte que subissent leurs producteurs. Le taux de croissance des ENR est à peine supérieur à celui de la croissance de la consommation chinoise de…charbon. L’électricité de demain sera tout aussi carbonée que celle d’aujourd’hui sauf à être nucléaire.

 Les bulles se créent assez spontanément, toute seules, avec l’aide du monde de la finance, sans que l’État n’y rajoute son grain de sel avec l’argent de l’impôt et celui de la dette.        26 octobre 2017

 

L'automobile ne va pas disparaître mais se réinventer.

 

L'automobile fut au cœur de la société industrielle. Elle joua un rôle clé dans la naissance des grandes entreprises, de la rationalisation du travail et du lien salarial. Elle inventa, avec Ford, production et consommation de masse. Elle est indissociable de l'émergence des classes moyennes. Elle a façonné les modes de vie, l'organisation sociale et la structuration de l'espace depuis le début du XXe siècle.

La puissance de l'industrie automobile reste exceptionnelle. Avec 91 millions de véhicules neufs vendus dans le monde, elle génère plus de 2000 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 50 millions d'emplois. En France, elle représente 16 % de la production manufacturière et compte 2,1 millions de postes de travail sur 16 millions d'emplois dans le secteur privé.

L'automobile reste sans concurrent véritable pour se déplacer dans les espaces non urbanisés

Aujourd'hui, l'industrie automobile affronte des défis sans précédent. La mondialisation fait basculer le marché automobile à l'Est et au Sud: la Chine est devenue le premier marché, avec 21,3 millions de véhicules, et pourrait atteindre 40 % des ventes mondiales en 2030. Par ailleurs, dès la moitié du XXIe siècle, plus de 60 % des hommes vivront dans des villes dont le niveau de congestion et de pollution devient insupportable. L'automobile est également rattrapée par l'ère des données et la révolution digitale: dans la chaîne de valeur, le hardware ne devrait plus compter que pour 40 %, contre 40 % pour le software et 20 % pour les services. Enfin, le lien de confiance avec les consommateurs a été ébranlé par la multiplication des scandales, notamment le «dieselgate» né chez les constructeurs allemands - réputés les meilleurs.

D'aucuns en concluent à la fin de l'automobile. À tort car la demande de mobilité et de connexion croît plus vite que le nombre des hommes. L'automobile reste sans concurrent véritable pour se déplacer dans les espaces non urbanisés comme pour desservir le dernier kilomètre. L'automobile ne va donc pas disparaître mais se réinventer. La voiture sera électrique, autonome et connectée. Les usages feront une large place au partage. La propriété et le traitement des données seront déterminants. Ceci implique une profonde transformation des constructeurs, mais aussi des consommateurs et des régulateurs.

Sous la pression des autorités publiques et des consommateurs, l'industrie automobile a acté la fin 
du diesel et le basculement vers l'électrique, même si le moteur à combustion sera longtemps présent. États et villes multiplient les annonces. La France entend proscrire le moteur à essence à compter de 2040. Paris a décidé l'interdiction du diesel à partir de 2025 et l'essence à partir de 2030. La Chine s'est fixé pour objectif de compter 20 % de voitures disposant d'une alternative à l'essence en 2025, mais aussi d'assurer la production de 80 % des voitures électriques vendues dans le pays par des constructeurs nationaux.

Le parc mondial compte 2 millions de voitures électriques sur 1 milliard de véhicules en circulation. Elles seront 70 millions en 2025 et 530 millions en 2040. Ainsi en 2017 seront vendus un million de véhicules électriques, dont 335 000 en Chine. Le développement des voitures hybrides sera plus spectaculaire encore, pour atteindre 50 à 60 % du marché en 2030.

Les freins au développement de la voiture électrique et autonome ne sont plus dans l'industrie mais du côté des autorités publiques

D'où l'apparition de nouveaux acteurs, à l'image de Tesla - voire de Google -, mais surtout un bouleversement de la stratégie des constructeurs traditionnels. En Allemagne, Volkswagen, soucieux de faire oublier le «dieselgate», s'engage à produire 50 modèles 100 % électriques et 30 hybrides rechargeables d'ici à 2030, tandis que BMW table sur 25 nouvelles voitures électrifiées, dont 12 totalement électriques. Volvo ne produira que des voitures électriques ou hybrides à partir de 2019. Le leader du marché de la voiture électrique demeure pour l'heure l'Alliance Renault-Nissan qui se mobilise pour défendre son avance. Renault a construit son plan stratégique autour d'une diminution de moitié de la production de diesel, tandis que seront mises sur le marché 8 voitures 100 % électriques et 12 hybrides sur 21 nouveaux modèles d'ici à 2022.

Jusqu'à présent, États et métropoles ont fort peu investi dans les infrastructures indispensables au véhicule électrique et autonome: «smart cities», routes intelligentes, bornes de recharge, reconfiguration du réseau électrique, cadre juridique pour la collecte et le traitement des données, régime de responsabilité du véhicule autonome. Les freins au développement de la voiture électrique et autonome ne sont plus aujourd'hui dans l'industrie mais du côté des autorités publiques. Il est vital de les lever si l'Europe ne veut pas manquer la révolution de la mobilité après s'être laissé marginaliser dans l'économie numérique alors qu'elle dominait l'industrie des télécommunications en 2000.

 

N. Baverez   le Figaro 16 octobre 2017

 

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Commentaires
Y
Ce simulacre de complicité entre Jupiter et son ballot de service était certainement convenu à dessein pour permettre aux Français d'entrer dans les coulisses de l'Elysée et dans l'intimité de son locataire. Du coup, le regard caudataire de LD, était un peu celui des téléspectateurs - ballots béats...<br /> <br /> Et le "ballot" était plutôt bon dans son rôle de ballot... Mais peut-être que les journalistes qui ont poussé des cris d'orfraie étaient un peu jaloux ?
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