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Le Naïf dans le Monde
30 mars 2018

L’Électricité en France (2ème partie)

 

La cour des Comptes et le Nucléaire

En 2012 puis en 2016 la CdC s’est adressée au problème des coûts de maintenance du parc nucléaire et a relevé les incertitudes qui pesaient sur son avenir rendant impossible l’élaboration d’une politique cohérente.

Un extrait du rapport de 2012 et les commentaires de M. Migaud sur ce rapport.

Un extrait du rapport de 2016 qui ne fait que constater que l’état du dossier s’et encore compliqué et qu’aucune réponse n’a été apportée pour clarifier la politique énergétique nationale.

Il n’est sans doute pas commode pour M. Migaud de dire que le Gouvernement navigue dans l’incohérence.

 

Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes.  Janvier 2012

 Les questions en suspens

 Parallèlement, la crise financière aggrave les incertitudes sur la rentabilité à moyen et long terme des actifs constituant les portefeuilles et donc sur leur capacité à couvrir, à terme, les besoins de financement des charges futures. Les évolutions du dispositif ont eu lieu sans que la commission qui devait structurer la gouvernance de ce dispositif soit mise en place, ce qui est très regrettable. La CNEF (Commission nationale du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs) est désormais en état de fonctionner, de donner un avis sur l’état actuel du dispositif et, éventuellement, sur son adaptation à la situation financière actuelle.

La Cour recommande que ce sujet fasse l’objet d’un nouvel examen car il n’est pas sain que la structure et la logique initiale du dispositif soient profondément modifiées par des dérogations successives, chaque fois que se présente une nouvelle difficulté. La durée de fonctionnement des centrales est une variable stratégique qui devrait faire l’objet d’orientations explicites

La durée de fonctionnement de chaque centrale fait l’objet d’un examen décennal par l’Autorité de sureté nucléaire (ASN) qui précise les conditions d’une éventuelle autorisation de poursuivre l’exploitation. Actuellement, seuls deux réacteurs des centrales du Triscastin et de Fessenheim ont reçu une autorisation de fonctionnement jusqu’à 40 ans, sous réserve de la réalisation de travaux significatifs pour en améliorer la sécurité. Toutefois, comptablement, les centrales d’EDF sont amorties sur 40 ans depuis 2003. Or, la durée de vie des centrales a un impact significatif sur le coût de production réel en permettant d’amortir les investissements sur un plus grand nombre d’années. D’autre part, elle repousse dans le temps les dépenses de démantèlement et le besoin d’investissement dans de nouvelles installations de production. La Cour constate que, d’ici une dizaine d’années (fin 2020), 22 réacteurs sur 58 atteindront leur quarantième année de fonctionnement. Par conséquent, dans l’hypothèse d’une durée de vie de 40 ans et d’un maintien de la production électronucléaire à son niveau actuel, il faudrait construire 11 EPR d’ici la fin de 2022, ce qui paraît très peu probable, voire impossible, y compris pour des considérations industrielles. Cela signifie qu’il est fait l’hypothèse soit d’une durée au-delà de 40 ans, comme semble l’indiquer la « programmation pluriannuelle des investissements » (PPI) de production d’électricité pour la période 2010-2012,  qui « privilégie un scénario central de prolongation au-delà de 40 ans du parc nucléaire », soit d’une évolution du mix énergétique vers d’autres sources d’énergie, sans que ces orientations stratégiques n’aient fait l’objet d’une décision explicite, connue du grand public, alors qu’elles nécessitent des actions de court terme et des investissements importants. Des investissements importants sont à prévoir à court/moyen terme avec des conséquences significatives sur le coût de production global Ainsi, le prolongement de l’autorisation de fonctionnement jusqu’à 40 ans, la prise en compte des conséquences des évaluations de sûreté faites à la suite de Fukushima (rapport de l’ASN) et le maintien du taux de disponibilité des centrales à un niveau acceptable (entre 80 et 85 %) nécessitent un doublement du rythme actuel d’investissement de maintenance, ce qui représente une augmentation d’environ + 10 % du coût courant économique de production (CCE). Par ailleurs, si les centrales actuelles étaient remplacées par des EPR dont le coût de construction (au moins 5 Md€ pour un EPR « de série ») sera très sensiblement supérieur à celui des centrales actuelles, et dans l’hypothèse d’une durée de vie des centrales actuelles de 50 ans, cela supposerait un investissement de 55 Md€ (11 EPR) dans les 20 ans qui viennent. Quelles que soient les réponses données à ces questions dans l’avenir, la Cour relève qu’à court et moyen terme des dépenses importantes d’investissements sont prévisibles tant en matière de maintenance que de construction de moyens de production de remplacement ; elles viendront s’ajouter aux dépenses d’investissement dans les réseaux de distribution ou dans la recherche, s’il est décidé de poursuivre le programme de développement des réacteurs de 4ème génération, qui devrait conduire à des investissements sensiblement supérieurs à ceux faits actuellement dans ce domaine, sans qu’il soit actuellement possible de les chiffrer. Les conséquences stratégiques et financières de cette situation doivent être analysées de manière à pouvoir en tirer des orientations de la politique énergétique à moyen terme, publiquement connues et utilisables par tous les acteurs du secteur. En effet, compte tenu du délai, en matière de politique énergétique, entre la prise de décision et ses effets, particulièrement long pour le nucléaire mais qui existe aussi pour toutes les autres filières, y compris pour les économies d’énergie, ne pas prendre de décision revient à faire un choix, celui de faire durer le parc actuel au-delà de 40 ans.

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Commentaires de Didier Migaud dans la    Revue Générale Nucléaire  du 22 février 2012

Dans son rapport public annuel, la Cour des comptes se penche sur la situation et les défis de la maintenance nucléaire. Pour les experts de la rue Cambon, l’objectif de 50 % de production d’électricité nucléaire en 2025, fixé par la Loi Transition énergétique, impliquerait la fermeture d’un tiers du parc en exploitation, l’équivalent de 17 à 20 réacteurs. Si la Cour recommande au gouvernement d’identifier les conséquences industrielles et financières de l’application de la loi sur le programme de maintenance « Grand carénage », elle suggère qu’en l’état, ce programme soit « intégralement révisé » pour éviter les « dépenses inutiles ». Décryptage avec Didier Migaud.
 

RGN - Quelles sont les priorités en matière de maintenance nucléaire ?

Didier Migaud - Entre 2003 et 2007, les investissements de maintenance de centrales nucléaires étaient inférieurs à 1 Md€ par an, la priorité étant donnée aux investissements internationaux. Du fait de ce faible niveau de dépenses, le parc des réacteurs nucléaires français a affiché de mauvaises performances et sa disponibilité s’en est trouvée affectée, ainsi que le résultat de l’entreprise EDF. En 2013, la perte de production due à la prolongation des arrêts de tranches a ainsi pu être estimée à près de 800 M€. La priorité est donc de rétablir les indicateurs de performance des réacteurs sur le plan de la disponibilité.

La Cour identifie trois axes prioritaires et formule des recommandations en ce sens. Tout d’abord, il est essentiel d’analyser l’impact de la loi sur la transition énergétique sur le parc de réacteurs, et donc sur le programme de maintenance. Ensuite, dans la perspective de l’élaboration du plan stratégique d’EDF, arrêté dans le cadre de la PPE (1), il convient de mettre à jour les évaluations des opérations de maintenance, en tenant compte des incertitudes et aléas qui leurs sont associés. Enfin, en raison des difficultés attendues en matière de recrutement et de formation, la Cour recommande d’intensifier la mobilisation des acteurs de la filière, publics et privés, visant à combler les pénuries de compétences identifiées dans la perspective du « Grand Carénage ».
  [1] La PPE va permettre de décliner de façon opérationnelle les orientations de la politique énergétique fixées par la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte.

Les dépenses de maintenance ont augmenté ces dernières années, les résultats sont-ils au rendez-vous ?

DM - Les investissements de maintenance dépassent aujourd’hui les 4 Mds par an. On constate que les indicateurs de performance se redressent, même si le coefficient de disponibilité reste inférieur à ce qu’il était dans la première moitié des années 2000.

 

Le programme « Grand Carénage » est-il nécessaire ? Qu’elles en sont les composantes et les logiques propres ?

DM - Outre le redressement des performances, la logique économique du programme est cohérente : prolonger la durée d’exploitation d’un investissement rentable et largement amorti.

Afin de limiter la durée des arrêts et donc de la production électrique, tout en améliorant la qualité des interventions, EDF a d’abord cherché à optimiser l’organisation des travaux de maintenance. Le programme « Grand Carénage », qui doit s’exécuter entre 2014 et 2025, couvre l’ensemble des investissements de maintenance des centrales nucléaires et est considéré par EDF comme un projet industriel unique, depuis les études d’ingénierie jusqu’à la mise en œuvre concrète sur les sites. Sur le plan organisationnel, le « Grand Carénage » s’est traduit par la mise en place, au niveau national, d’une instance spécifique qui doit coordonner et arbitrer en permanence les projets selon les ressources humaines et financières disponibles. Ce schéma a été reproduit au niveau local, pour chaque centrale nucléaire. En outre, les équipes chargées de la maintenance ont été renforcées soit par des créations de postes, soit par la mise en place de services d’appui mutualisés.

EDF a également renouvelé la gestion de ses pièces de rechange. Avant 2010, chaque site gérait un stock local, mais, selon EDF, la disparité des nomenclatures rendait difficile la vision globale et la gestion des urgences. À partir de cette date, la gestion des pièces de rechange a commencé à être intégrée dans sa politique de maintenance, avec la volonté d’homogénéiser les pratiques et de regrouper les commandes aux fournisseurs. L’entreprise a donc désigné un de ses services centraux, responsable de l’approvisionnement de toutes les pièces de rechange.

Les investissements sont liés, pour moitié environ, à la sûreté des réacteurs. Dans cette catégorie, le principal poste de dépenses concerne les contrôles réglementaires et les épreuves des appareils à pression ainsi que le déploiement des nouveaux référentiels de sûreté. L’autre poste significatif regroupe les modifications à apporter aux installations nucléaires consécutivement à l’accident de Fukushima. Elles concernent essentiellement la mise en place d’une Force d’action rapide nucléaire (FARN) et la réalisation du « noyau dur » prescrit par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

L’autre moitié du montant des investissements est nécessaire pour permettre le maintien de la production d’électricité. Ils concernent essentiellement des opérations de remplacement ou de rénovation de composants lourds, ou encore des opérations de maintenance lourde sur certains composants. Elle exclut la cuve et l’enceinte de confinement des réacteurs, qui sont les seuls composants non remplaçables d’une centrale nucléaire.


La Cour parle d’une enveloppe de 100 Mds€. De son côté, l’exploitant communique sur 55 Mds€. Quelles différences ces chiffres recouvrent-ils ?

DM - EDF a regroupé l’ensemble des investissements de maintenance prévus sur la période 2014 à 2025 sous la terminologie de « Grand Carénage ». Estimé à 55 Md€ en valeur 2011, soit 56,4 Md€ en valeur 2013, ce programme correspond au seul montant des investissements prévus sur cette période de 11 ans. Le périmètre et la période retenue par la Cour, pour l’évaluation des dépenses de maintenance, sont différents. Elle prend pour référence une période plus longue, 16 ans, de 2014 à 2030, et ajoute les dépenses d’exploitation à celles d’investissement. Les deux évaluations sont cohérentes. Les dépenses d’investissement sont estimées à 74,73 Md€ (en valeur 2013) entre 2014 et 2030 et celles d’exploitation à 25,16 Md€ (en valeur 2013) pendant la même période.

Emplois, retombées économiques pour la filière, etc. vous conseillez à EDF de « réviser » son programme, le « Grand carénage » est-il trop ambitieux ?

DM - La Cour se préoccupe surtout de la cohérence de ce programme, défini par l’entreprise publique, avec les orientations de politiques énergétiques votées par le Parlement.

Le plan de maintenance du parc des réacteurs nucléaires a été conçu par EDF de façon globale, afin d’optimiser ses opérations et ses dépenses afférentes. Il repose sur l’hypothèse du prolongement de la durée d’exploitation des centrales au-delà de quarante ans et du maintien du parc dans son périmètre actuel. Je tiens à souligner que la réglementation française n’impose aucune limite à la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires, mais la conditionne au respect des normes de sûreté imposées par les prescriptions de l’ASN. À cet égard, les exigences en matière de sureté se sont accrues, notamment après Fukushima et évolueront sans doute encore à l’avenir, ce qui est un facteur d’incertitude.

Le projet de maintenance d’EDF a pour objectif de permettre au parc actuel d’être exploité avec le meilleur rendement, si possible au-delà de 40 ans, durée pour laquelle les réacteurs d’EDF ont été conçus dès l’origine. Afin d’y parvenir et d’optimiser l’organisation des opérations de maintenance, leurs coûts et leurs effets sur la capacité de production d’électricité, EDF a donc élaboré son projet sur le long terme et à l’échelle des besoins pour l’ensemble du parc existant de 58 réacteurs.

Mais la loi sur la transition énergétique entraîne la perspective d’une fermeture de plusieurs réacteurs, ce qui implique la nécessité pour l’entreprise d’élaborer un nouveau programme de maintenance, afin d’assurer que les réacteurs encore en service produisent de l’électricité dans des conditions de sûreté et avec une rentabilité suffisantes, tout en l’adaptant aux réacteurs dont la fermeture est programmée.

Vous parlez d’ « incertitudes », à quoi sont-elles liées ?

DM - Outre celles sur l’avenir des réacteurs eux-mêmes, les incertitudes concernent essentiellement l’impact de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l’évolution du référentiel de sûreté, comme je l’ai indiqué précédemment, ainsi que la stratégie industrielle du groupe EDF.

Sur ce plan industriel, elles tiennent au fait que la plupart des opérations d’investissements de maintenance seront réalisées par des prestataires extérieurs, car elles font appel à des compétences rares dans des métiers tels que la chaudronnerie, la robinetterie, la réparation et l’expertise. EDF fait appel à des entreprises spécialisées, qui interviennent aussi pour d’autres secteurs industriels. Toutefois, EDF doit s’assurer de conserver des compétences lui permettant d’exercer sa responsabilité de maître d’ouvrage. Par ailleurs, les arrêts de réacteur pour raison de maintenance, sont, pour la plupart, réalisés entre mars et octobre, période pendant laquelle la demande en électricité est la moins forte. Cette saisonnalité nécessite, dans des délais courts, un apport très important de main d’œuvre qualifiée. L’ensemble des projets industriels d’EDF et leurs répercussions sur la filière nucléaire devraient nécessiter 110 000 recrutements d’ici 2020 dans les emplois directs et indirects, dont environ 70 000 recrutements allant du niveau Bac professionnel au niveau Bac + 3, dans un contexte de forte tension pour les recrutements de profils techniques. Près des deux tiers des entreprises de la filière connaissent, en effet, des difficultés de recrutement en personnel qualifié dans plusieurs segments industriels mais aussi dans les bureaux d’étude. EDF a également identifié une faiblesse de la ressource d’encadrement, générale à tous les segments, alors même que les délais de formation sont longs. Plus généralement, l’entreprise considère que les capacités des dispositifs de formation sont sous-dimensionnées. La filière nucléaire est donc confrontée à un défi, puisque les capacités des entreprises, déjà en deçà des besoins actuels d’EDF, sont appelées à augmenter considérablement avec le programme « Grand Carénage ».

Les risques d’incohérence entre une loi très volontariste et les contraintes techniques, économiques, de sûreté… ont-ils été suffisamment anticipés ?

DM - La mise en œuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte est susceptible de remettre en cause les investissements envisagés et d’obliger l’entreprise à fermer jusqu’à un tiers de ses réacteurs, avec des conséquences importantes en termes d’emplois, sans écarter l’éventualité d’une indemnisation prise en charge par l’État.

Pour autant, et malgré ces enjeux majeurs pour l’entreprise et l’État, aucune évaluation économique de ces conséquences potentielles n’a été réalisée avant la publication de la loi. Cette évaluation doit être réalisée à l’occasion de l’élaboration de la PPE et traduite dans le plan stratégique de l’entreprise.

Comment avez-vous calculé la fermeture d’un tiers des réacteurs ?

DM - C’est la conséquence mécanique de l’objectif fixé par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité de 77 % en 2014 à 50 % à l’horizon 2025. À hypothèses constantes de consommation et d’exportation d’électricité à cet horizon, cet objectif aurait donc pour conséquence de réduire d’environ un tiers la production nucléaire, soit l’équivalent de la production de 17 à 20 réacteurs. Seule une augmentation très significative de la consommation électrique ou des exportations serait de nature à limiter le nombre des fermetures. Or, à l’horizon 2030, l’hypothèse d’une telle augmentation n’est pas retenue par les experts.

Bien entendu, ceci suppose que la montée en puissance des énergies renouvelables se déroule elle-même selon les objectifs prévus, et qu’elle puisse être financée.

Quand faudrait-il avoir les évaluations des conséquences économiques pour inclure des directives dans la PPE (sachant que les investissements du Grand Carénage doivent être planifiés et engagés) ?

DM - La loi a prévu que l’adoption de la PPE, dont l’échéance est prévue pour avril ou mai 2016, soit assortie d’une étude sur l’impact économique, social et environnemental de la programmation et sur la soutenabilité pour les finances publiques.

Les conséquences potentielles sur l’entreprise EDF, qui a besoin de visibilité à long terme pour programmer ses investissements, sont telles que des décisions nous semblent devoir être arrêtées dans les meilleurs délais.

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Cour des comptes : Rapport public annuel 2016

Chapitre 2 : Énergie et développement durable

 La maintenance des centrales nucléaires. Une politique remise à niveau, des incertitudes à lever.

Les 58 réacteurs nucléaires exploités par EDF en métropole font l’objet d’opérations de maintenance pour remplacer ou rénover des équipements et les entretenir, afin d’assurer la fourniture d’électricité dans des conditions de sûreté soumises à des normes impératives.

EDF a remis à niveau sa politique de maintenance

Entre 2006 et 2011, le parc nucléaire d’EDF a affiché de mauvais indicateurs de performance, mais ceux-ci (capacité technique à produire de l’électricité, sûreté nucléaire, « temps métal ») se redressent depuis 2011, notamment en raison d’un effort d’investissement significatif. Le « temps métal » est un indicateur interne à EDF qui représente le degré d’organisation des opérations de maintenance lors d’un arrêt de réacteur.

Ils doivent néanmoins faire l’objet d’une vigilance constante de la part d’EDF.

La maintenance des centrales nucléaires : une politique remise à niveau, des incertitudes à lever

EDF a pris des mesures pour améliorer la maintenance des centrales

En 2011, EDF a lancé le programme «  Grand Carénage  » qui couvre l’ensemble des investissements de maintenance de ses centrales nucléaires actuelles. Il a pour objectif de permettre leur exploitation avec le meilleur rendement, si possible au-delà de 40 ans, durée pour laquelle les centrales ont été conçues dès l’origine. EDF a également révisé son organisation interne, le déroulement des arrêts de réacteurs et la gestion de ses équipements et pièces de rechange.

La maîtrise des conditions d’externalisation doit rester une priorité pour EDF

EDF externalise 80 % des opérations de maintenance auprès de prestataires extérieurs, dans le cadre de règles de concurrence et de transparence maîtrisées. Au regard des indicateurs disponibles et des contrôles réalisés par les organismes indépendants que sont l’Autorité de sûreté nucléaire et l’Inspecteur général pour la sûreté nucléaire et la radioprotection, les prestataires interviennent dans des conditions qui ne mettent pas en cause leur sécurité mais nécessitent une attention permanente de la part d’EDF.

Sécuriser la production d’électricité requiert un programme de maintenance ambitieux

La réalisation du programme de maintenance d’EDF pourrait atteindre 100 Md€ (2013) entre 2014 et 2030, soit 1,7  Md€(2013) en moyenne par réacteur. Ce chiffre inclut les investissements et les dépenses opérationnelles de maintenance.

Le projet ne devrait avoir qu’un impact limité sur le coût de production de l’électricité nucléaire, contrairement aux variations de la production dont les effets sont potentiellement plus importants. En effet, l’augmentation de 50 % des investissements entrainerait moins de 5 % de hausse de ce coût, alors qu’une baisse de 50 % de la production moyenne entrainerait son doublement.

Le programme de maintenance d’EDF est soumis à de fortes incertitudes

Le besoin de recrutement de la filière nucléaire est estimé à 110 000 emplois directs et indirects d’ici 2020, y compris pour répondre aux besoins du groupe dans ses nouveaux projets nationaux et à l’export. Il se heurte à des tensions sur certains segments industriels (soudage, tuyauterie, etc.) et aux incertitudes stratégiques qui n’incitent pas les entreprises à investir et embaucher. Malgré des initiatives d’EDF, des pouvoirs publics et des acteurs de la filière nucléaire (information, fidélisation des partenariats industriels), leur mobilisation reste insuffisante, notamment en matière de formation professionnelle.

Le projet industriel est aussi dépendant de l’évolution du référentiel de sûreté. Les incertitudes qui en découlent pourraient modifier le calendrier du projet et ses options techniques, avec un effet potentiel de 5,11 Md€ (2013) au minimum, sur son coût.

La maintenance des centrales nucléaires : une politique remise à niveau, des incertitudes à lever

Les budgets d’investissements intègrent, en outre, un niveau important d’incertitudes, estimé à 13,30 Md€2013 entre 2014 et 2030. Mais l’insuffisance du modèle d’évaluation des coûts d’EDF ne permet pas de valider cette évaluation. Enfin, l’application de la récente loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015 devrait conduire EDF à réviser en profondeur son programme de maintenance. En effet, le plafonnement légal de la puissance installée à 63,2 GW pourrait impliquer l’arrêt des deux réacteurs de Fessenheim et l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production nationale d’électricité à 50 % à l’horizon 2025, celui de 17 à 20 autres réacteurs. Aucune évaluation n’a encore été réalisée, ni par l’État ni par EDF, sur les conséquences économiques potentielles de l’application de la nouvelle loi. Les enjeux s’élèvent pourtant à plusieurs milliards d’euros par an. Ainsi, dès 2025, les pertes de recettes annuelles d’EDF pourraient s’élever à 5,7 Md€, tandis que ses charges d’exploitation ne seraient réduites qu’à hauteur de 3,9  Md€. Le montant des investissements pourrait diminuer jusqu’à 1,5 Md€ annuels et le patrimoine d’EDF être réduit de la valeur des actifs de production fermés (entre 1,7 Md€ et 2 Md€2013 annuels). Ces évaluations ne tiennent compte ni des effets des fermetures sur le coût de l’énergie, avec des impacts sur l’emploi et la croissance, ni des éventuelles compensations ou indemnisations que EDF pourrait obtenir de l’État et dont le montant n’a pas encore été évalué. Les implications de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte devront être spécifiquement identifiées et évaluées dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) en cours de définition sous la responsabilité de l’État, afin qu’EDF puisse en intégrer les orientations dans le volet «  maintenance  » de son plan stratégique, prévu par la loi.

Recommandations

1. Identifier dans l’étude d’impact de la PPE, prévue par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, ses conséquences industrielles et financières sur le programme de maintenance des réacteurs nucléaires ;

2. Dans la perspective de l’élaboration du plan stratégique d’EDF, arrêté dans le cadre de la PPE, mettre à jour les évaluations des opérations de maintenance en tenant compte des incertitudes et aléas qui leurs sont associés ;

3. En raison des difficultés attendues en matière de recrutement et de formation, intensifier la mobilisation des acteurs de la filière, publics et privés, visant à combler les pénuries de compétences identifiées dans la perspective du « Grand Carénage ».

NB : Il manque à cette présentation un graphique qui montre l’envolée de coûts de maintenance d’EDF pour le parc nucléaire, coûts qui passent de 500 millions en 2003 à 5 milliards maintenant.

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